La stratégie d’ouverture de Nicolas Sarkozy révèle une ambiguïté fondamentale du débat démocratique : la mise à nu de l’artificialité des antagonismes martelés lors des campagnes électorales. Si l’ouverture est si facile à mettre en œuvre, c’est parce qu’elle s’appuie sur un non-dit souverain : au-delà des démarcations sur le bien-fondé d’une politique, les Français ont l’intime conviction que la monochromie programmatique dessert les intérêts collectifs de la France.
Certes, une action politique ou sociale s’arrime au corpus d’une école de pensée dont les racines dessinent une appartenance politique. Mais, pour une grande majorité de Français, cette unilatéralité idéologique, siège d’une seule et unique vertu agissante, n’a plus cours. Pis encore, elle est dangereuse. Ce ne sont plus l’UMP ou le PS qui détiennent les clés d’une réussite politique, mais un peu des deux. Et la présidentialisation rampante de nos institutions va, de fait, renforcer ce mode de gouvernance.
Bien entendu, il existera toujours des campagnes électorales, où la part démagogique (une forme de scénarisation du culturisme idéologique) se taillera une place toujours importante, mais les futurs vainqueurs à la conquête du Graal présidentiel seront ceux qui, à l’évidence, auront su faire résonner dans leur campagne la douce mélodie syncrétique.
Le comportement électoral des Français s’apparente de plus en plus à un consumérisme durable. Ces derniers ont universalisé d’une certaine manière le rapport qu’ils entretiennent avec un élu de proximité. Qu’un élu soit de gauche ou de droite relève de plus en plus de l’anecdote, pourvu qu’il soit habité par le bon sens, que les équipements publics répondent aux attentes, que les rues soient propres, que les problématiques sociétales soient inscrites dans des réponses ajustées aux craintes d’un pays qui craint plus la mondialisation que la Chine ! C’est ce besoin de maternage, de réassurance à travers un projet réunificateur que les Français apprécient dans le comportement stratégique de Nicolas Sarkozy. Et contrairement à ce qui est dit, le dépeçage en règle du PS est plus une chance pour ce dernier que le contraire puisqu’il va activer la nécessité d’un élan refondateur au sein d’un parti dont le logiciel n’a pas seulement dysfonctionné mais a été purement et simplement volé.
La seule question haletante aujourd’hui est la suivante : ce pari de l’œcuménisme parviendra-t-il à trouver sa matérialisation resplendissante dans les faits ? Le pari de la mixité idéologique est-il jouable dans une confrontation de partis menacée par l’effacement des distinctions ? Nicolas Sarkozy ne fait finalement que préempter une révolution mentale de la pensée politique de la France, rendue possible par l’échec du crypto-marxisme et la dureté doctrinale de l’hyperlibéralisme.
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