On est là. Las surtout. On regarde. Sans fièvre. On attend. Meeting unitaire de lancement de campagne législative. Belle tapisserie de références usées par le temps du surplace. On n’entend plus rien. Pas une proposition, pas une interview, comment dire, défrisante. Un nostra culpa puis l’amorce d’un autre discours. On ressent comme un écrasement. Un sentiment d’infériorité. Aucune autorité dialectique. Rien.
On se fait les dents sur les félonies de ceux qui sont passés dans le camp d’en face. C’est bien mais en politique, on ne construit rien de bien durable sur les supposées défaillances de l’adversaire. Les intellos sont repartis au boulot. Les fenêtres censées s’ouvrir sur la jeunesse, sur les nouvelles têtes, sur les nouveaux modes de liaisons entre le monde associatif et les responsables politiques, sur la refondation inéluctable ne sont que des vasistas où l’œil de Solferino veille, vidéosurveillance chargée de punir les décalages.
Comme sur un vélodrome, on se crispe sur la machine en attendant le premier sprint. DSK a tenté trois minutes après la défaite de Ségolène une échappée. Paf, rattrapé, sermonné, accusé d’opportunisme. Alors ? Rien… Le vide, les « je suis disponible », les « si je suis en situation », les appels à l’unité –quel formidable disposition au psittacisme dans ce PS le plus rouillé du monde- qui ressemblent à des messes ânonnées par de vieux prêtres que la modernité effraie.
Oui, tout est creux dans la boutique, même l’appel de L’Obs au débat qui se réduit à quelques textes gentils envoyés à une copine qui vient de perdre son chat alors qu’elle était en train de passer son Bafa… Les sociologues des organisations ont disséqué le danger qui menace ces dernières lorsqu’elles sont organisées de telle sorte qu’elles ne font qu’adorer les surplaces itératifs qui évitent les affirmations de talents.
En face, dans la sarkosphère, ça bouge, ça gueule, ça crie, ça se trompe, ça effrite l’éthique, c’est bien dans ses bottes, même si elles sont parfois plantées dans la fange des petits arrangements entre amis (m’enfin, dans ce domaine, le PS devrait faire attention à ne pas trop se parer des plumes de la vertu tant certains titres nationaux lui sont organiquement liés). Philippe Val, à sa manière dérangeante de mettre les pieds dans le plat, a raison d’insister sur le besoin de dire : « Nous, c’est ça. Eux, c’est ça ».
Nous, la gauche, on ne veut pas du service minimum pour les raisons suivantes. Nous, la gauche, on ne veut pas du tout répressif pour ces raisons précises. De toute façon, a-t-elle le choix, cette gauche ? Courir après Sarkozy ? Trop dur, il est trop fort, son virilisme conservateur est inimitable ! Alors, il reste à ripoliner les bonnes intentions. Il reste à reprendre les idées concassées par le broyeur médiatique. Il reste à apprendre à les dire, à les muscler, car la communication fait tout, certes, mais elle est encore plus efficace à partir du moment où les idées qu’elle porte sont frappées d’une réelle solidité, d’une forte adhésivité.
Pour le PS, le temps est à l’épure, à l’esthétique conceptuelle, à la sobriété ascétique… Mais l’organisation interne du PS, telle qu’elle existe, avec ses courants, ses baronnies locales, ses dynasties cryptoétatistes, cryptocollectivistes, va dégoûter définitivement ceux qui ont envie d’y croire, comme moi. Au PS, l’ascenseur social aussi ne fonctionne plus…