Un lecteur attentif de ce blog –qu’il en soit remercié- m’interroge sur la satisfaction que j’éprouve et que j’entends partager avec d’autres d’un gouvernement où les femmes et les minorités visibles trouvent enfin une représentation en harmonie avec la place qu’elles occupent dans la société.
Mon féminisme s’origine dans l’absurdité archaïque d’une représentation politique otage d’un système de renouvellement inadapté aux exigences de la société. Il va de soi qu’une Fadela Amara me paraît mieux à même de trouver des solutions aux problèmes récurrents des banlieues qu’un énarque dont je ne préjuge pas les qualités mais dont le corpus intellectuel n’est pas adapté à la perception d’un monde hypersensible que l’étrécissement du vivre ensemble éloigne de plus en plus de l’analyse.
Nous devons revenir à la base du politique. Le politique est un lieu d’impulsion de projets, de captation des réalités vécues que l’administration d’Etat, dans son extrême complexité, doit intégrer à des fins de résolution. Tant que ce trajet vertueux de l’acte politique demeurera, l’espoir de changer la vie persistera. Le fatalisme est un cancer de notre démocratie. Les parties de la civilisation qui renoncent à l’exercice de leur liberté trouvent généralement dans l’enfermement communautaire et la violence frustrée envers l’autre, cet ennemi total aux contours informes, le seul exutoire à leur délaissement.
La société française est riche de ses diversités ; il s’agit d’une banalité rousseauiste, penseront certains. Mais le rappel de cette évidence ramène toujours au même constat : cette diversité ne reste qu’une statistique formelle tant qu’elle ne trouve pas, au plus haut niveau de l’Etat, sa concrétisation. Le recours à une forme stupide de quotas ne fait que pointer la pusillanimité de nos gouvernants jusqu’à ce jour, apeurés à l’idée de promouvoir l’excellence de composantes sociales dont l’empressement qu’ils mettent à dénoncer la stigmatisation manque à l’évidence d’authenticité.
Oui, bravo, six fois bravo, à Nicolas Sarkozy d’avoir su faire marier la France telle qu’elle est avec la France gouvernante. Ce courage, à l’heure où il se déploie, fustige la lâcheté de la gauche, obnubilée par la peur de voir une telle ouverture renforcer l’impact du Front national.
Pour l’heure, bien sûr, il ne s’agit là que d’une photo officielle. Et le rôle des femmes des minorités visibles consistera justement à ne pas se laisser enfermer dans la gadgétisation du symbole qu’elles portent, malgré elles. Pour Rachida Dati, le problème est réglé : un Garde des Sceaux n’a pas vocation à faire de la figuration dans un gouvernement. Pour Rama Yade et Fadela Amara, le pari est plus risqué : il faudra être ferme face à cette main tendue… La bonne santé d’une démocratie se mesure à l’aune de l’harmonie effective de sa représentation.
Il ne manque plus à Nicolas Sarkozy qu’à déployer une plus grande voilure proportionnelle pour traduire le souhait des Français d’une représentation politique équilibrée à tous les niveaux de l’action publique pour que la boucle soit bouclée. De pratiquer l’ouverture qu’il a affichée dans la constitution de son gouvernement à tous les niveaux pour que la voix du peuple, par bonheur multiforme, soit prise en compte ; pour que la démocratie ne se résume pas à un gagnant omnipotent et à un battu accablé lorsque l’on sait que le choix du pays se joue à quelques centaines de milliers de voix près. La réforme de nos institutions passe par ce plus grand ajustement entre les désirs d’un peuple et les modalités de leur mise en œuvre.
La base de la politique, comme tu le soulignes, est d’organiser les rapports entre les Hommes dans la société. En mettant, les attaches personnelles de coté, afin de promouvoir l’interêt général. Partant de ce postulat, en quoi la représentation des minorités dans le gouvernement est un gage d’assurance, dans la perspective de servir l’interêt public ? Un gouvernement sert une nation. Il n’en est pas le reflet. On devient ministre, grâce à son talent et à son travail. Pas à cause de son sexe ou de sa couleur de peau.
On dérive dangereusement vers un système où, il ne s’agit
même plus de représenter des aspirations en termes de choix politiques, mais de représenter en tant que telles des minorités ethniques, sexuelles, religieuses ou autres. Outre, la promotion du communautarisme, l’idée celon laquelle les minorités doivent être representée, si nécessaire à l’aide de passes-droits (discrimination positive) fait volée en éclat
les principes fondamentaux de la République. Il n’y a qu’à lire les textes qui fondent ce pays, et qui ont pleine valeur constitutionnelle:
« Les hommes naissent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. » Article 1er de la Déclaration de 1789.
« La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège soit qu’elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents » Article 6 de la Déclaration de 1789.
« Tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance possède des droits inaliénables et sacrés » Préambule de la Constitution de 1946 (alinéa 1).
« La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » (alinéa 3).
« La France assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » Préambule de la Constitution de 1958.
Quand le Conseil constitutionnel argumente, en 1982 et en 1999, que « les principes constitutionnels s’opposent à toute division par catégories des électeurs ou des éligibles » et qu’il n’autorise pas de fait, les quotas par sexe ou la parité dans les élections, il concorde avec la philosophie juridique de la République française. Cette jurisprudence est précise et explicite. Mais, le pouvoir politique a délibérément écarté les valeurs de la République et introduit une contradiction fondamentale au sein des textes constitutionnels. C’est exactement ce que l’on retrouve dans la composition actuel du gouvernement.
On s’insurge contre Georges Frêche: “Dans cette équipe, il y a neuf blacks sur onze. La normalité serait qu’il y en ait trois ou quatre. Ce serait le reflet de la société.” Mais ce qu’il dit correspond exactement avec l’air du temps. Et ce principe, qui « dictate » que les élus doivent être le miroir de la societé. Avec la banalisation du dénombrement racial et sexuel, autrement dit en reconnaissant explicitement des conceptes racialistes/sexualistes, on se retrouve sans aucun fondement pour contrer le propos de Frêche.
L’exemple même est celui de Gaston Flosse. Il a commencé par affirmer qu’il n’était pas « convenable » de nommer un préfet musulman. Sous la levée de bouclier, il s’est ensuite, dépêcher d’en trouver un, et de le nommer. Il s’autoproclame dorénavant comme le héros de la si populaire « diversité » qui n’est au final que l’écran de fumée de la discrimination positive. Je suis moi-même métisse. J’incarne donc à moi seul, jusqu’a la moindre fibre de mon ADN, la sacro-sainte “diversification de la société”. Cependant je me moque de savoir l’appartenance éthnique d’un élu. Pire, je conçois comme inaproprié voir dégradant, qu’on souligne la pygmentation de la peau comme “critère positif” pour occuper un ministère.
La politique n’est pas un jeu. Seul, les plus compétents peuvent prétendre diriger la France. Blanc, noir, arabe, homme ou femme, peu importe. Seul la compétence doit être prise en ligne de compte. Si il n’y avait que des noirs à l’Assemblée Nationale il n’y aurait rien d’outrageant. Pareil, si la totalité des nos députés étaient des hommes. Car je me fiche du sexe des représentants, comme de celui des anges. Surtout, que les travaux des parlementaires femmes ne sont en rien brillants. Comme je le disais, la parité n’apporte incontestablement et absolument rien au regard de l’intérêt général.
En 2003, Mme Royal été chargée de conduire l’opposition par rapport au projet de la révision constitutionnelle sur la décentralisation à l’Assemblée Nationale. Son attitude hystérique et de mauvaise foi pendant les débats, conjugué à une incompétence assez flagrante, avait naturellement provoqué des critiques légitimes de certains députés (l’exaspération atteignait même certains députés socialistes). Mme Royal, pour répondre aux arguments la contrant, n’a rien trouvé d’autres que de taxer ses collèges de sexistes et de misogynes ! Je conseil vivement la lecture de ces travaux, pour se faire une opinion du poison que représentent les arguments sexuels ou raciaux en politique.
[…] me déclare en état de guerre contre l’idiocratie Ma croisade commence par cette échange que j’ai établi, avec Stéphane Menu, rédacteur en chef d’un hebdomadaire sur […]
Cher ami, l’ennui, avec la constitution, si vertueuse soit-elle, c’est qu’elle fixe le cadre d’un contenu que la réalité piétine sans retenue. Ta bataille contre l’idiocratie, je la valide. Au fait, suis-je un idiocrate ? Pourquoi pas ! Dans un débat, j’accepte tout, même l’idée de susciter les réactions les moins amènes. Mais enfin, je ne me permettrai pas de traiter d’idiot parce que tu ne penses pas comme moi. A moins qu’il s’agisse d’un malentendu, dans ce cas, l’incident est clos. Car je partage l’essentiel de tes points de vue sauf celui qui consiste à croire qu’un ascenseur institutionnel existerait permettant à toutes les minorités visibles de partir sur un même pied d’égalité dans ce monde perclus de racisme et d’hétérophobie. Peut-être sera-ce la part irréductible de nos échanges. A bientôt et vive le débat.
Ah faux de faux, je ne traite pas d’idiot et ce que j’entends par idiocratie ne t’englobe pas personnellement. C’est juste l’euphorie que suscite ces nominations plus spectacles que politiciennes qui m’exaspèrent. Aucune volonté de t’offenser. Et je précise que tu as été chercher ce commentaire me citant, sur mon blog, hors contexte donc avec ton billet.
Si tu penses qu’on peut jouer aux apprentis sorciers avec la constitution, c’est ton point de vue. C’est une position imminement respectable, mais aux antipodes de la pratique juridique dans un Etat de droit. Quand on sait que la prééminence du droit est le fondement de la démocratie, ça laisse songeur.
Le racisme oui, or ce n’est pas en ayant recourt à son genre de pratique qu’on le combattra. Nommer un noir, en raison de sa couleur est un acte dépourvu de sens, et pour le coup, totalement raciste. La constitution assure l’égalité de tous. C’est cette idéologie multiculturaliste qui est fautive. Elle incite les immigrés à ne pas s’assimiler et à cultiver leur différence, les possibilités d’intégration fondent et le risque de rejet et de ghettoïsation grimpent. Prétendre être en désaccord avec ces évidences coïncide avec de l’angélisme ou de la littérature. Ce n’est pas une particularité française. Avant de faire le procès de la « panne » de l’ascenseur, regardons avant les coups que l’on porte à cet ascenseur : n’est-il pas mal chargé, auquel cas il est inévitable qu’il ne monte plus ?
Il n’est pas proscrit aux femmes de rechigner sur les métiers du bâtiment et leur absence des chantiers n’est alors pas indubitalement révélatrice d’une discrimination sournoise. Pour la politique c’est exactement la même chose. Moins de 20% femmes sortent de l’ENA, en vertu de quoi doit-on imposer un quota de 50% au gouvernement? C’est en ce sens où j’emplois le terme « idiocrate ». Tout simplement, car la méritocratie républicaine, régresse là, où l’idiocratie zoologique progresse.
Au plaisir.